Après tant de naufrages en Méditerranée et d’images de réfugiés désespérés fuyant la guerre et le chaos au péril de leur vie, il aura fallu la photo insoutenable d’Aylan, enfant syrien de 3 ans mort sur une plage turque, pour provoquer un sursaut des consciences à travers l’Europe. De la multiplication des initiatives citoyennes pour aider et héberger les réfugiés à l’appel lancé par le pape François à toutes les communautés de l’Église catholique pour accueillir des familles, en passant par le revirement du gouvernement français en faveur d’un mécanisme d’accueil obligatoire à l’échelle européenne, ce réveil est salutaire et porteur d’espérance.

Nous étions peu nombreux il y a quelques semaines. La vue d’un enfant nous a glacés collectivement ; demain c’est devant le regard de nos enfants qu’il nous faudra assumer notre réaction face à l’inacceptable.

C’est pourquoi, n’ayons aucune retenue à le dire : agir, vite et massivement, n’est plus une option. L’Europe doit s’ouvrir à tous les réfugiés qui frappent à sa porte.

Nous devons accueillir tous les réfugiés, en premier lieu car c’est la seule réponse cohérente face à la tragédie. En effet, à rebours de ceux qui protestent déjà du caractère utopique d’une telle proposition, une réalité s’impose : tant que dureront les multiples conflits autour de la Méditerranée, nul discours de « fermeté » ni politique de fermeture ne retiendront les parents de Syrie ou d’ailleurs de fuir pour tenter de mettre leurs enfants à l’abri ; or tant que nous dresserons des obstacles à leur arrivée dans des conditions normales, ils continueront à mourir sur les plages et les routes d’Europe. Dès lors, ne pas aller à leur secours avant que le voyage ne leur soit fatal et ne pas leur garantir asile et protection comme la convention de Genève nous y oblige, est irresponsable et potentiellement criminel.

Le simple pragmatisme rejoint ici l’exigence morale et politique : il nous faut bâtir des ponts plutôt qu’ériger des murs honteux et dérisoires. Cela implique une politique active et solidaire pour accueillir dans l’Union européenne toutes celles et tous ceux qui viennent y chercher asile et leur permettre une installation décente. À cet égard, le principe de quota d’accueil des réfugiés entre pays de l’UE, s’il constitue un pas vers une approche collective organisée, est en soi insuffisant : seule la mise en œuvre réelle d’un accueil inconditionnel sera à la hauteur de l’exigence humanitaire.

Nous devons accueillir tous les réfugiés aussi parce que nous le pouvons. Comment prétendre que l’Europe, ensemble politique le plus riche de la planète, ne peut assumer des entrées inférieures à 0,5 % de sa population ? Comment accepter que la France, sixième­ puissance économique mondiale, y prenne une part moindre que l’Italie et la Grèce ?

Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale d’EELV

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