Exposé des motifs

Le principe d’égalité est un fondement de la République française. Nos politiques publiques doivent donc garantir l’effectivité de cette égalité entre les citoyens quel que soit leur territoire d’origine ou de vie. Cependant, bien que la République reconnaisse aux ultra marins le droit à l’égalité réelle au sein du peuple français (art.1.Titre 1er de la LOI n° 2017-256 du 28 février 2017), les rapports et les indicateurs démontrant l ‘aggravation des écarts entre l’hexagone et les outre-mer se succèdent. Les liens historiques avec l’hexagone n’ont cessé de se renforcer au fil des années entraînant les déplacements nécessaires pour des raisons éducatives, professionnelles, familiales, de santé ou autre.

En Outre-mer, s’agissant de l’éducation, nombre de formations ne sont pas disponibles contraignantes pour les jeunes à s’expatrier de leurs territoires.

De même en matière de santé publique, les défaillances sont bien connues et documentées. Ainsi, de nombreux concitoyens ultramarins n’ont d’autre choix que de se déplacer, à leurs frais, sur le territoire hexagonal pour être soignés avec efficacité.

Les relations commerciales d’Outre – mer se concentrent essentiellement avec l’hexagone, dans une proportion très importante : 75 % des importations et plus de 80 % des exportations ultramarines sont échangées avec la France hexagonale.

Plus d’un million d’ultramarins vivent en France hexagonale sous l’impulsion, notamment, de la politique mise en place jusqu’en 1981 du BUMIDOM ou par l’étroitesse du tissu économique des Outre-mer. Nombre d’entre eux se retrouvent alors isolés de leur famille et de leurs liens sociaux.

L’épanouissement des liens humains et sociaux, le développement économique des Outre – Mer ont généré une fluidité et une facilité des déplacements. Ces déplacements, eu égard à la distance, ne peuvent qu’être aériens. Le prix de ce transport, déjà onéreux, est en constante augmentation depuis des années. Plus de 1 000 € pour un Paris – Pointe à Pitre, plus de 1 500 € pour un Paris – Papeete. Il en est de même pour les déplacements entre les Outre-Mer où on observe des tarifs allant jusqu’à 2 000 € pour un trajet Guyane – Antilles équivalent à 2 heures de vol. A titre de comparaison, un Paris – Nice est bien souvent à moins de 200€ avec Air France, qui est le même transporteur. Les prix se sont ainsi envolés de plus de 40% sur les dernières années.

Le principe de continuité territoriale a pourtant été instauré en janvier 1976 dans d’autres territoires hors hexagone, comme en Corse, afin de réduire les contraintes de l’insularité.

L’application du principe de continuité territoriale en Corse relève de deux dimensions, celle de l’accès à la mobilité et celle de l’égalité territoriale. Ces deux notions visent à faire converger la Corse avec les normes économiques et humaines des régions hexagonales et à garantir l’unité nationale. Ce principe est dévoyé dans les Outre-Mer, puisqu’il se résout à une simple dotation dite « de continuité territoriale » alors qu’en l’espèce, il s’agit d’une simple aide à la mobilité au sens du droit européen. Cela ne s’apparente pas à un mécanisme de régulation garantissant des valeurs d’égalité, mais se définit comme un mécanisme de compensation tarifaire sans contrepartie de la part des opérateurs aériens. Pour les territoires ultramarins, un dispositif d’accès à la mobilité géré par l’Agence de l’Outre-Mer pour la Mobilité (LADOM).

Ce dispositif actuel demeure largement inefficace, malgré les 6 millions d’euros d’augmentation annoncés en mars 2023 par le Ministre délégué aux Outre-mer. Cette subvention individuelle correspond à des montants compris entre 270 et 846 euros et ce exclusivement sur les déplacements entre les territoires ultramarins et l’hexagone. En outre, celle-ci est soumise à des conditions de ressources restrictives : seuls ceux ayant des revenus annuels inférieurs à 11. 991 euros peuvent y prétendre et n’est mobilisable que tous les 3 ans.

Il est donc indispensable que l’ensemble des territoires français puisse bénéficier d’une continuité territoriale réelle dans le respect des principes constitutionnels d’égalité et d’unité nationale.

Motion

• Considérant :

  • Que la continuité territoriale réelle avec l’ensemble des outre-mer doit être un impératif national, visant à garantir à l’ensemble des populations ultramarines leur déplacement, dans des conditions raisonnables d’accès, de services passagers suffisants en termes de régularité, fréquence, qualité de service, prix ;
  •  Que ce n’est pas un luxe de prendre l’avion pour aller se soigner, retrouver ses proches, participer à la vie de la nation, etc.… ;
  •  Que cette nécessité a engendré une « rente de situation » des compagnies aériennes qui pratiquent des prix exorbitants ;
  •  Que le dispositif actuel demeure largement inégalitaire. La dotation attribuée à la continuité territoriale Outremer est de 33 millions répartis entre tous les territoires (2 872 728 habitants) soit environ 11,50 euros/habitant alors que dans le même temps la dotation attribuée à la corse (343 700 habitants) est de 220 millions soit environ 640 euros/habitants (données INSEE au 31/12/2022) ;
  • Que le dispositif actuel est inefficace car il exclut la majorité de la population ;
  • Que ce dispositif n’est mobilisable qu’une fois tous les 3 ans ;
  • Que le nouveau dispositif supposera devoir tenir compte des futures contraintes environnementales ;
  • Que la continuité territoriale doit être égalitaire pour l’ensemble des territoires français.

• Le Conseil fédéral d’EÉLV demande à l’État :

  • D’appliquer une continuité territoriale réelle pour l’Outre-mer au même titre que celle de la Corse ;
  • D’abonder en conséquence le fonds de dotation à la continuité territoriale dans le cadre d’une redéfinition des missions de LADOM ;
  • De mettre en place un dispositif d’obligation de service public (OSP) ayant pour objet, dans le cadre adapté au mode de transport aérien, de fournir des services passagers suffisants en termes de continuité, de régularité, de fréquence, de qualité, et de prix abordables au plus grand nombre tel que défini par la législation nationale et européenne*.

Unanimité pour

(*) Règlement (CE) n° 1008/2008 du parlement européen du 24 septembre 2008


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