Exposé des motifs

Vu la motion de cadrage sur les modalités de désignation pour les élections européennes 2024 votée par le Conseil fédéral le 1er avril 2023 :

https://www.EELV.fr/cf-avril-23-ML-be-euro-2024/

Alors que nous avons lancé dès le mois de mars 2023 un travail de consultation des commissions thématiques, des Régions et parlementaires EELV sur le programme et le récit à porter pour les élections européennes 2024, nous nous apprêtons à désigner les personnes qui tireront notre liste pour incarner notre projet écologiste pour l’Europe. Pour préparer et réussir les élections, nous avons besoin de prévoir un plan d’action pour construire ce projet afin qu’il repose sur un récit et un programme commun qui nous mène à la victoire et qui transforme l’Union européenne.

En tant qu’écologistes, nous défendons l’Europe par conviction de cœur et d’esprit. Parce que nous savons ce que l’idéal européen a apporté et l’espoir qu’il peut encore représenter aujourd’hui mais aussi parce que nous mesurons, face aux défis économiques, sociaux, environnementaux et démocratiques de notre époque, au besoin de construire des règles qui permettront de lutter contre les inégalités et de répondre à l’urgence climatique, à quel point l’échelon européen est nécessaire et incontournable.

L’Union européenne reste une démocratie inachevée, son processus de décision et ses capacités budgétaires ne lui permettent pas encore de répondre aux enjeux de notre époque. Une transformation en profondeur, un véritable saut fédéral et une démocratisation accrue sont nécessaires pour entraîner les citoyennes et les citoyens et surmonter collectivement la multiplicité des crises auxquelles nous faisons face. Les fondements de la paix et de la solidarité sur lesquels s’est construite l’Europe sont menacés avec l’invasion russe en Ukraine. La crise sociale, le choc de la désindustrialisation et l’absence d’un modèle économique qui garantisse notre souveraineté accélère la précarisation des citoyen·ne·s. Les crises climatique et énergétique, l’effondrement de la biodiversité, l’accroissement des inégalités sociales, l’augmentation du coût de la vie mettent en péril le tissu social et civique. Les Européen·ne·s sont confronté·e·s à des défis majeurs qui exigent la mise en œuvre d’actions politiques audacieuses et collectives.

L’Union européenne, levier indispensable de la lutte contre le changement climatique

L’Union européenne joue un rôle crucial dans la lutte contre le changement climatique et l’effondrement de la biodiversité. Ses décisions s’appliquent à près de 500 millions de citoyennes et citoyens et doivent bénéficier principalement aux plus fragiles d’entre elles et eux. L’Union européenne peut devenir le premier acteur politique dans le monde pour la protection de l’environnement et la diplomatie climatique. Nous devons pour cela lui donner des objectifs écologistes inédits et lui donner la possibilité d’exercer des prérogatives fortes, pour réduire notre empreinte environnementale tout en améliorant les conditions de vie des plus démuni·e·s. L’Union européenne doit changer de logiciel économique à l’aune de cet impératif et l’ensemble des politiques européennes devront être revues dans le cadre d’un traité environnemental constitutionnel remplaçant le pacte de stabilité et de croissance ainsi que les critères de Maastricht, afin de fonder une économie verte et résiliente ayant pour finalité l’utilité sociale et environnementale, la durabilité et le respect des droits des travailleurs et travailleuses tout autant que des droits humains et du vivant. Cette économie doit être régénérative et mobilisée pour l’adaptation de nos territoires au dérèglement climatique et aux mutations écologiques. 

Promouvoir une approche globale pour une société du progrès environnemental, économique et social

Nous défendons l’idée d’un progrès qui ne repose pas sur la croissance économique mais dont la boussole est le bien-être des personnes, la justice sociale et la protection des droits fondamentaux et du vivant. Nous croyons en un progrès fondé sur une économie respectueuse de l’environnement et des êtres humains, une politique fiscale juste de lutte contre l’évasion fiscale, avec des indicateurs adaptés permettant de construire nos politiques publiques en vue de ces objectifs. Les ressources propres européennes assises sur la fiscalisation de ceux qui échappent aujourd’hui à l’impôt est une condition non seulement à la puissance d’action de l’UE mais également à ce qu’elle fonde ses actions sur un socle plus démocratique. Un véritable budget européen est l’une des conditions pour assurer une transformation nécessaire vers une Europe de l’écologie. La politique agricole commune (PAC) doit être refondée afin de modifier les règles de concurrence, de soutenir les pratiques vertueuses et de prioriser l’agriculture locale, dans un souci de protection de l’environnement, de la biodiversité, de la santé et du vivant. De la même manière, nous devons repenser et réorienter les fonds européens afin que ceux-ci soient pleinement au service du progrès social et environnemental, pour réduire les inégalités et améliorer les conditions de vie des Européen·ne·s qu’ils ou elles vivent dans des territoires urbains, péri-urbains ou ruraux, sur le continent comme dans les territoires d’outre-mer. L’Union européenne doit enfin initier les mutations industrielles dont nous avons besoin pour réduire notre empreinte environnementale – et pour cela investir dans la reconversion des secteurs touchés, la formation et le soutien aux nouvelles filières afin de créer de nombreux emplois dans les métiers de la transition.

Construire le chemin vers une Europe de la défense et de la diplomatie
pour renouer avec la paix

La guerre en Ukraine doit remettre à l’agenda politique la question de l’investissement des Etats membres de l’Union européenne et de ses citoyen·ne·s dans leur sécurité collective à long terme. C’est la paix qui doit motiver l’initiation d’une véritable politique européenne de sécurité et de défense à la hauteur des enjeux contemporains. Un budget européen commun pour la défense doit être constitué afin de mutualiser les dépenses des États membres afin d’éviter les doublons, réduire les risques, faire des économies et permettre à l’UE d’être un acteur à part entière sur la scène internationale. Nous devons penser la défense européenne en complémentarité avec celles des organisations multilatérales : il s’agit pour nous, Français·e·s et Européen·ne·s, de parvenir à un partenariat atlantique.

rééquilibré qui doit permettre de tendre vers une autonomie stratégique européenne. Enfin, les Européen·ne·s doivent devenir précurseur·e·s en pensant la sécurité humaine et du vivant au cœur de sa politique de défense et de sécurité. Nous soutenons le renforcement de la prévention civile des conflits en améliorant les capacités de médiation et de réconciliation, en lien étroit avec les organisations non gouvernementales. Pour cela, nous devons doter l’Union européenne de moyens diplomatiques suffisants pour peser sur la scène internationale. En un mot, n’ayons pas peur de l’affirmer : la sécurité et la défense doivent devenir de véritables piliers de l’Union européenne pour assurer la paix à l’intérieur et à l’extérieur de son espace politique.

Renforcer la démocratie et la transparence

L’espace européen est celui du dialogue et du compromis. Loin de la verticalité et de la personnalisation du système institutionnel français, le modèle européen permet une représentation proportionnelle lors de l’élection des député·e·s et un parlementarisme plus fort. Beaucoup reste à faire néanmoins pour améliorer son fonctionnement et regagner la confiance des citoyen·ne·s, notamment en matière de transparence, d’éthique, et de lutte contre les conflits d’intérêts – comme l’a prouvé encore récemment le “Qatargate”. Nous avons besoin de bâtir une véritable démocratie européenne. Nous défendons l’établissement d’une démocratie parlementaire qui abandonne la règle de l’unanimité pour celle de l’adoption à la majorité qualifiée. Nous voulons renforcer et rendre plus accessibles les dispositifs comme l’initiative citoyenne européenne ou les conventions citoyennes, afin de donner aux citoyen·ne·s un espace et des outils pour agir et porter leurs voix, pas seulement tous les 5 ans lors des élections européennes.

Construire une majorité progressiste pour sortir du statu quo et contrer l’extrême droite

Nous devons sortir des majorités techniques qui favorisent l’intergouvernementalisme, le statu quo et les intérêts économiques à court terme au détriment de la protection du vivant et du bien-être des citoyen·ne·s. Ces derniers mois, l’extrême droite européenne a augmenté son influence de manière inquiétante : arrivée au pouvoir de Georgia Meloni en Italie, alliances entre la droite et l’extrême droite en Suède et en Finlande au niveau national, en Espagne au niveau local, résultats électoraux inédits en Allemagne. Dans ce contexte, la droite traditionnelle et les libéraux ont montré leur incapacité à faire face au risque que représente l’extrême droite. Si quelques-uns excluent encore l’idée d’une alliance avec l’extrême droite, ils sont de plus en plus nombreux à reprendre leurs positions, défendant une politique inhumaine vis-à -vis des migrant·e·s ou s’opposant à toute nouvelle mesure pour faire face à la crise écologique. Notre responsabilité est d’empêcher que la droite et l’extrême droite disposent d’une majorité dans le futur Parlement, en nous mobilisant pour que le plus de député·e·s écologistes et de gauche soient élu·e·s en juin 2024 et en construisant une majorité progressiste, écologiste et sociale. En tant que représentant de l’écologie politique en France, nous sommes prêt·e·s à participer à les construire pour engager un changement de cap immédiat en Europe. Nous devons le faire en pensant à la jeunesse et aux générations à venir. Le futur sera vert ou ne sera plus. A nous aujourd’hui d’assurer cette transformation pour redonner espoir dans le futur.

Fonder une nouvelle République fédérale européenne

L’interdépendance des crises et la nécessité d’apporter des réponses globales, continentales, à ces urgences appellent à un sursaut fédéraliste et à reconnaître la force prescriptrice de l’Union européenne. Seule une puissance économique et politique comme l’Union européenne aura les moyens de peser sur notre destin commun et d’assurer la protection de l’ensemble des citoyen·ne·s européen·ne·s. Même si cela est encore insuffisant, l’Union européenne a su activer en l’espace de quelques années seulement toute son utilité face à la pandémie du Covid-19 et au déclenchement de la guerre en Ukraine. Face à ses limites et à ses manquements, nous nous élevons face aux rhétoriques eurosceptiques et nationalistes, nous sommes convaincu·e·s qu’il est nécessaire de construire une nouvelle République fédérale européenne, basée sur le respect du vivant sous toutes ses formes, garantir la protection des droits fondamentaux, des libertés et de la dignité de toutes et tous dans le respect des limites planétaires. Une Europe protectrice.

Créer un nouvel idéal européen

Pour contribuer à bâtir ce grand mouvement de transformation pour une Europe plus intégrée et plus démocratique, nous devons saisir ce moment pour afficher et affirmer nos valeurs écologistes et populaires, fédéralistes et solidaires, pour impulser un nouvel idéal européen. Les crises inédites auxquelles font face les Européen·ne·s doivent leur donner la conviction qu’un nouveau chapitre peut s’ouvrir en Europe. La paix, le progrès et le respect du vivant doivent fonder ce nouveau rêve pour lui donner une substance concrète. Pour de nombreux pays voisins, l’Europe est un symbole de justice, de prospérité et de liberté. La porte de l’Union européenne doit rester ouverte aux pays voisins. Pour nous, elle doit également être une Europe sociale et féministe, garante des droits humains et des libertés fondamentales. Un sanctuaire pour les chercheurs et chercheuses de refuge, leur assurant un accueil digne et humain, en rupture avec les politiques répressives actuelles et permettant d’anticiper l’arrivée croissante de réfugié·e·s climatiques dans les prochaines années. Nous devons être à la hauteur de cette aventure politique et humaine qui pense l’intérêt général et oppose l’union aux nationalismes. C’est en tant que communauté de destin que nous devons repenser l’Europe. 

Gagner pour transformer l’Europe : la responsabilité des écologistes

Pour faire advenir ce nouveau rêve européen, nous devons être à l’offensive et construire une dynamique suffisante pour être au cœur de la future majorité politique en Europe. Le vote écologiste est un vote de transformation. Un vote d’émancipation. Les écologistes se battent pour le climat et une société plus juste de la même façon sur le terrain et dans les institutions. Nous savons que notre responsabilité pour un futur désirable est grande. Et cela passe en premier lieu par la construction d’une République fédérale européenne fondée sur un nouveau sens de la démocratie, de l’écologie et des droits et libertés civiles. Cela passe nécessairement par un groupe écologiste renforcé et incontournable dans le prochain mandat. Cela passe aussi par une campagne réellement paneuropéenne autour d’un récit et d’un socle programmatique commun à l’ensemble des listes écologiques européennes pour montrer la cohérence de l’écologie politique européenne, incarnée par une tête de liste commune aux membres du Parti Vert Européen. 

Motion

Réuni les 1er et 2 juillet 2023, le Conseil fédéral d’Europe Écologie les Verts décide :

– D’élaborer un récit et un socle programmatique, avec nos partenaires européens et dans le cadre général adopté par le Congrès de juin 2023 du Parti Vert Européen, dont le Manifeste pour les élections européennes sera adopté début 2024 ;

– De travailler à la structuration et au développement du récit via un processus participatif mobilisant l’ensemble des adhérent·e·s jusqu’à la fin de l’année 2023 ;

– D’approfondir le discours et le programme porté par notre parti via le conseil programmatique et les commissions thématiques ;

– D’adopter le calendrier suivant pour construire un récit politique et un programme commun : 

1. Mars à juin 2023 : travail préparatoire avec les commissions thématiques, les Régions et les parlementaires EÉLV ;

2. Juillet à décembre 2023 :

– Mise en place d’ateliers participatifs en ligne pour débattre des sujets structurants du récit et du programme, opérer des arbitrages et établir les mesures phares à porter pendant la campagne ;

– Organisation d’une consultation ouverte sur l’extérieur ;

– Réalisation d’auditions externes.

3. Au plus tard début 2024, vote par le Conseil fédéral du programme élaboré par Europe Ecologie – Les Verts, cohérent avec le socle programmatique du Parti vert européen.

Unanimité moins 2 contre et un blanc


Retour sur les motions adoptées par le Conseil fédéral d’Europe Écologie Les Verts des 1er et 2 juillet 2023