Adoptée par le Conseil fédéral d’Europe Écologie Les Verts du 9 janvier 2022

Exposé des motifs

Islamo-gauchisme, wokisme, intersectionnalité, pensée décoloniale, les maux dont souffrirait la communauté académique sont nombreux si l’on prête attention aux discours de la majorité en place ou de la droite traditionnelle. Si historiquement, ces menaces de la science par le pouvoir politique, religieux, économique ne sont pas nouvelles, elles n’en sont pas moins inquiétantes pour les personnes visées et la vitalité de notre démocratie. 

Derrière ces concepts sans réalité scientifique (comme concernant l’islamo-gauchisme ce qu’a récemment rappelé le CNRS [1]) ou intentionnellement détournés de leur sens original (les approches intersectionnelles sont des méthodes d’étude des dominations et discriminations), l’objectif est sans doute de polariser le débat public autour de thématiques jugées plus favorables électoralement par le pouvoir en place. Moins avouable, l’ambition de ces attaques est sûrement aussi de discréditer les analyses rationnelles issues de la communauté académique. Au nom de ce péril imaginaire, la diversité et la nature internationale des savoirs sont remis en cause. 

La liberté académique ou liberté universitaire est la liberté que la communauté universitaire (et de l’Enseignement Supérieur) doit avoir en matière de recherche scientifique, d’enseignement et d’expression dans le cadre de leur fonction, sans subir de pressions économiques, politiques ou autres.

EÉLV est convaincu de l’importance de ces libertés académiques et de l’autonomie, dans leurs recherches et enseignements, des universitaires, chercheuses ou chercheurs de toute forme de pouvoir. Ces libertés sont la condition nécessaire permettant une construction collective de connaissances et de vérités scientifiques partagées à l’abri de toute influence ou pilotage. Elles sont aussi la source du rôle de lanceur d’alerte que peuvent avoir des scientifiques ou communautés scientifiques. 

Le statut de fonctionnaire, et le financement pérenne sont également des garants des libertés académiques. La précarité des postes et le contrôle des financements des laboratoires et des moyens alloués aux chercheuses et chercheurs, via les appels à projets, contraignent la production des connaissances scientifiques. Une recherche libre nécessite aussi un financement indépendant. L’exigence de temps long de la recherche n’est pas compatible avec une vision utilitariste à court terme.

Cette autonomie ou liberté professionnelle ne signifie évidemment pas que les personnels concerné·e·s n’ont pas de compte à rendre. Elles et ils ne peuvent pas non plus utiliser leur appartenance académique pour porter n’importe quelle position pseudo-scientifique dans le débat public d’une quelconque caution intellectuelle. Leurs pratiques doivent être intègres et suivre la déontologie scientifique. Elles et ils sont responsables devant leur·e·s pair·e·s et la société.

Motion

Le conseil fédéral d’EÉLV des 4 et 5 décembre 2021 :

 · Réaffirme son soutien absolu aux libertés académiques. Une action politique éclairée nécessite une recherche et un enseignement académiques vivants et donc libres.

· Soutient l’indépendance des carrières et des financements. Ces tâches doivent être assurées par la communauté académique libérée de la bureaucratie managériale issue des réformes universitaires de ces dernières décennies.

· Rappelle l’obligation morale et statutaire de l’État de garantir des conditions de travail correctes, la santé et la sécurité de ses employé·e·s d’autant plus lorsqu’ils et elles sont attaqué·e·s dans le cadre de leurs fonctions.

· Souhaite redonner une liberté de recherche effective aux chercheuses et chercheurs par un soutien ambitieux (recrutements statutaires par les pair·e·s, moyens adaptés aux spécificités disciplinaires) rééquilibré au profit des crédits pérennes. 

· Souhaite revenir à une programmation de la recherche moins dictée par des priorités industrielles, politiques, économiques ou de santé publique court-termistes.

· Affirme la nécessité de protéger à plus long terme ces libertés en réaffirmant le rôle essentiel de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche publique dans la société.

· Exprime à nouveau son soutien et réclame la libération de l’anthropologue franco-iranienne Fariba Adelkhah emprisonnée en Iran depuis maintenant plus de deux ans.

Références : 

 – [1] https://www.cnrs.fr/fr/l-islamogauchisme-nest-pas-une-realite·scientifique

Unanimité moins 1 blanc



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