Adoptée par le Conseil fédéral d’Europe Écologie Les Verts des 5 et 6 février 2022

Exposé des motifs

Europe Écologie – les Verts constate que les habitant·e·s des quartiers populaires sont particulièrement vulnérables face au dérèglement climatique. La « fin du monde » et les fins de mois difficiles, voire impossibles, ont un rapport de causalité directe, dont il faut réussir à démontrer l’évidence. Notre parti doit se saisir pleinement de cette question de justice sociale et climatique majeure. L’écologie politique s’adresse à tout·e·s : il est crucial d’élargir son audience, au-delà des classes moyennes supérieures habitantes des cœurs de métropoles, souvent peu concernées par les problématiques vécues dans les quartiers. Pour cela, elle doit intégrer des raisonnements et des propositions conformes aux aspirations des habitant·e·s des quartiers populaires. Ces propositions doivent être inscrites dans l’ensemble de nos programmes politiques, à commencer par ceux de la présidentielle et des législatives à venir. Elles doivent être audibles et accessibles pour l’ensemble des électrices et électeurs. 

En termes d’action publique, les quartiers populaires en hexagone et en outre-mer sont l’objet d’une attention institutionnelle au travers de la politique de la ville[1]. Cette politique publique spécifique et exceptionnelle, malgré de nombreuses réformes au cours des quarante dernières années, pâtit toujours de critiques, voire de soupçons d’inefficacité. Elle ne représente pourtant que 0,3% du budget de l’État[2]. Les contrats de ville, cadre de mise en œuvre de la politique de la ville dans les territoires, arriveront à leur terme en décembre 2023. Le président et l’Assemblée nationale élu·e·s auront dès l’été 2022 à décider des orientations à donner aux futurs contrats de ville. Il est incontournable pour EELV de travailler dès à présent à des propositions concrètes et inspirées pour l’avenir des politiques publiques à destination des quartiers populaires.

La France compte aujourd’hui 5,5 millions d’habitant·e·s vivant dans un peu plus de 1500 quartiers en politique de la ville (QPV), en hexagone et en outre-mer, au sens du décret du 30 décembre 2014[3]. Quatre régions hexagonales en regroupent à elles seules plus de 60% : l’Ile-de-France (1,5 millions), les Hauts-de-France (660 000), Provence-Alpes-Côte d’Azur (511 000), et Auvergne-Rhône-Alpes (411 000). Avec les Outre-mer (570 000), le taux monte à près de 70%. Les QPV, dont la géographie a été définie à partir du critère de pauvreté des habitant·e·s, se situent à la fois en périphérie des villes, en centre-ville, en zone rurale et outre-mer. La réforme de la politique de la ville menée en 2014 a conduit à une réduction de la « géographie prioritaire » : le nombre de QPV est passé de près de 2500 à un peu plus de 1500, réduisant drastiquement le périmètre de certains d’entre eux, parfois jusqu’à 90% de leur emprise initiale. Des « quartiers de veille active » ont été constitués, mais ils ne bénéficient d’aucun crédit de la politique de la ville, alors même que la pauvreté continue d’y progresser. En outre, la population des quartiers populaires est particulièrement jeune : 40% des habitant·e·s y ont moins de 25 ans (contre un peu moins de 30% au niveau national).

Le 22 mai 2018, le Président de la République a annoncé lors d’une conférence l’abandon du plan Borloo, qui prévoyait un fonds de cinq milliards d’euros et dix-neuf propositions pour un changement radical de la conduite de l’action publique dans les quartiers populaires. Emmanuel Macron s’est exprimé en ces termes crus, pour justifier sa décision : « Ça n’aurait aucun sens que deux mâles blancs ne vivant pas dans ces quartiers s’échangent un rapport ». Si la logique des grands plans n’est pas la bonne, cela signifie-t-il que les quartiers populaires sont désormais considérés comme des causes perdues ? 

EELV doit se positionner en rupture avec les discours des quarante dernières années, renvoyant régulièrement les habitant·e·s des quartiers populaires à une assignation rhétorique empruntée à l’extrême droite et teintée de préjugés discriminatoires : celle du maintien de l’ordre et de la prévention de la délinquance. Les quartiers sont dépeints comme des lieux de violences, de trafics mafieux, de communautarisme, de radicalisation islamiste, et même « d’apartheid », de « séparatisme » et « d’ensauvagement ». Pourtant, les habitant·e·s des quartiers populaires sont souvent les premières victimes de l’insécurité. La « reconquête républicaine » brandie par le gouvernement n’apporte strictement aucune réponse à la progression de la pauvreté, de la précarité et de la violence. Un changement de paradigme dans l’approche politique et programmatique est donc nécessaire.

Par ailleurs, les quartiers populaires témoignent d’une longue histoire de luttes politiques pour leur droit à l’égalité, pleinement inscrite dans l’histoire de France. Les partis politiques ont démontré jusqu’à présent une incapacité à intégrer ces enjeux dans leur construction idéologique, préférant l’instrumentalisation de figures issues des quartiers populaires à la valorisation de leur autonomie politique. Il est enfin couramment admis mezzo voce dans la plupart des partis politiques, que les habitant·e·s des quartiers populaires étant peu et mal inscrit·e·s sur les listes électorales – et lorsqu’elles et ils le sont, plus fortement abstentionnistes qu’ailleurs – il n’est pas stratégique d’aller faire campagne auprès d’elles et eux.

Si des mesures fortes doivent être mises en œuvre, pour que puissent fonctionner des économies et des solidarités locales et résilientes, par et pour les habitant·e·s, une réforme des consciences elles-mêmes doit également être menée. L’inconscient collectif français continue de mépriser les quartiers populaires, lieux de concentration de populations précaires et plus racisé·e·s qu’ailleurs[4]. Le passé colonial n’est pas digéré, et les discriminations font rage. Des décennies de discours islamophobes ont en outre mené notre pays à une poussée épidémique des opinions racistes et xénophobes. L’égalité républicaine et la démocratie sont en danger. La reconnaissance des crimes commis par l’État français pendant la colonisation, ainsi qu’une politique nationale de lutte contre toutes les discriminations doivent être une bonne fois pour toutes assumées, par une gauche résolument et franchement écologiste.

L’impératif du changement climatique doit être l’occasion de ce changement de paradigme. Plus de justice sociale, plus de démocratie et une préservation de l’environnement et de la planète, voilà ce que demandent une majorité de Français·e·s, de plus en plus exposé·e·s à la pauvreté, au risque économique et à la précarité énergétique. Comment accepter que celles et ceux qui consomment le moins soient la cible d’un discours moralisateur et culpabilisant sur leurs modes de consommation[5] ? La consommation de produits de basse qualité issus des enseignes discount n’est pas un choix, mais une contrainte d’ordre économique. Comment accepter que les choix énergétiques de l’État condamnent les plus précaires à des hivers sans chauffage ? Les communautés d’énergie doivent être rendues accessibles aux quartiers populaires : elles constitueraient de bonnes solutions pour une réappropriation de la question énergétique et pour la disponibilité d’une énergie à coût maîtrisé.  Les habitant·e·s des quartiers populaires sont au fond la vigie du pays : ce qui s’y passe aujourd’hui est précisément ce qui menace demain. Les gilets jaunes, comme les marcheur·ses de 1983 et les porteur·ses des doléances après les révoltes urbaines de 2005, ont été disqualifié·e·s par le pouvoir. EELV doit réhabiliter leur·s parole·s et leurs revendications dans une approche inclusive et solidaire de la République.

Motion

La Commission Quartiers populaires soumet les bases d’un programme, qui sera ensuite décliné en un livret de propositions précises.

Ce programme postule que la question des quartiers populaires est politique, et qu’elle traverse tout le corpus idéologique d’EELV. Le programme pour les quartiers populaires doit recouper et irriguer l’ensemble du programme écologiste en divers points : égalité, logement, urbanisme, énergie, transports, éducation, santé, culture, etc. La présence d’une jeunesse nombreuse et engagée dans les quartiers populaires, doit également conduire EELV à lui prêter attention et écoute, afin d’avoir la capacité de lui offrir un avenir désirable. Les quartiers populaires ont besoin, plus que d’autres, de l’application d’un principe d’universalité de la solidarité, reposant sur un droit commun renforcé. 

Six idées-forces fondent la nécessité d’un programme en faveur des quartiers populaires, inscrit au cœur de la pensée écologiste :

  • La reconnaissance du pouvoir d’agir et de l’autonomie politique des habitant·e·s des quartiers populaires : la question démocratique se situe au cœur de l’histoire de leurs luttes. De la Marche contre le racisme et pour l’égalité de 1983 jusqu’aux Cahiers de doléances collectés en 2006 après les révoltes urbaines, les habitant·e·s des quartiers populaires n’ont cessé de se mobiliser et de tenter de faire entendre leurs voix. Le rapport de Mohamed Mechmache et Marie-Hélène Bacqué remis en juillet 2013 au ministre de la Ville n’a jamais pu trouver d’applications concrètes et satisfaisantes. Si EELV a déjà pris position en faveur du droit de vote des résident·e·s étranger·e·s, le parti doit renforcer ses propositions en matière de soutien aux engagements citoyens dans les quartiers. La capacité à l’auto-organisation y est particulièrement forte. Les associations et les collectifs doivent y être systématiquement reconnu·e·s et soutenu·e·s, dès lors que leurs revendications sont légitimes et porteuses d’ambitions en matière d’égalité des droits, de justice sociale et de lutte contre le dérèglement climatique. Cette reconnaissance doit permettre d’améliorer la confiance des habitant·e·s des quartiers populaires vis-à-vis du parti et de la politique en général. Enfin, les cultures populaires et urbaines, majoritaires et dominantes dans notre pays, doivent être reconnues dans leurs origines et leur force de diffusion.
  • La réalisation de l’égalité totale des citoyen·ne·s face aux institutions, dans le domaine de la justice et de la police : les relations entre la police et les habitant·e·s des quartiers populaires n’ont pas cessé de se dégrader depuis les années 1970. Les meurtres racistes, les violences policières et les contrôles au faciès répétés existent toujours, et les condamnations restent faibles, voire inexistantes. Les habitant·e·s des quartiers en sont les principales victimes et l’institution policière gagnerait à retrouver une estime et une confiance de la part de la population. La police de proximité, idée de droite faisant pourtant consensus dans les années 1990, a été remisée aux oubliettes depuis le coup de force du président Sarkozy. L’absence d’une politique claire en matière de lutte contre les discriminations liées à l’origine a également largement contribué à la montée des radicalismes religieux. La jeunesse des quartiers y est particulièrement sensible : elle est notamment dans l’incompréhension vis-à-vis d’une lecture de la laïcité qui la rend restrictive et non inclusive. Si EELV défend le rétablissement d’une police aux moyens humains améliorés, gardienne de la paix, ainsi que la légalisation du cannabis, à même de mettre fin à une partie des trafics, le parti doit également s’attaquer au problème de toutes les discriminations, y compris de l’islamophobie. Un plan national doit être lancé. La lutte contre le racisme et les discriminations liées à l’origine doit sortir du giron de la politique de la ville pour devenir l’affaire de tous·te·s. EELV doit mettre fin à cet errement de la République, assumer sa conscience, son éveil et même son « wokisme »[6], vis-à-vis des millions de Français·e·s racisé·e·s, victimes au quotidien des discriminations. 
  • Le retour de l’humain dans les politiques de renouvellement urbain : l’Agence nationale de la rénovation urbaine (ANRU) et l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat (ANAH), qui interviennent massivement depuis les années 2000 dans la transformation des quartiers populaires, ne prennent pas suffisamment en compte les enjeux sociaux et climatiques. Leurs règlements généraux doivent être modifiés. D’une part, la logique de démolition des logements existants doit être abandonnée : le patrimoine des quartiers populaires doit être préservé. Les milliards consacrés au renouvellement urbain ne doivent plus être utilisés à démolir, à enrichir les promoteurs et à déplacer les populations, mais à restaurer et à assurer une réhabilitation durable des quartiers, en accord avec leurs habitant·e·s. Les constructions existantes ont ceci de précieux : elles ne sont pas à refaire. L’ADEME indique que la construction neuve d’un bâtiment nécessite 80 fois plus de ressources que sa réhabilitation ou sa transformation. Les démolitions doivent donc être réduites à leur minimum, en fonction des seuls impératifs architecturaux (risques d’effondrement) ou d’aménagement (éloignement des zones de pollutions intenses). D’autre part, un plan massif d’investissements doit être lancé pour inscrire la réduction de la consommation d’énergie et la lutte contre la précarité énergétique au cœur des règlements généraux de l’ANRU et de l’ANAH. EELV doit enfin assumer que les quartiers populaires ont une âme et qu’ils ont vocation à rester populaires. Les « politiques de peuplement » leur sont le plus souvent défavorables. Si la mixité peut être recherchée, elle ne doit pas se faire au détriment du choix des personnes[7]. Ainsi, les dynamiques tant de « ghettoïsation » que de « gentrification » doivent être combattues. 
  • Le déploiement d’une action politique écologiste, pour la justice sociale et environnementale, par et pour les habitant·e·s des quartiers populaires : face au défi climatique, les habitant·e·s des quartiers populaires paient déjà le prix fort. La précarité alimentaire, la précarité énergétique, l’exposition aux pollutions des sols et de l’air, constituent des problèmes identifiés et mis en exergue par la pandémie de la Covid-19. Les quartiers populaires n’ont cependant pas toujours accès aux moyens déjà mis à la disposition d’autres territoires pour se nourrir mieux, préserver leur santé et améliorer leur cadre de vie. Des Plans alimentaires territoriaux (PAT) doivent être mis en place dans les quartiers populaires et la sécurité sociale alimentaire doit y être expérimentée au plus vite. Les taux de TVA doivent également être modulés, afin d’en libérer les produits de réelle première nécessité, frais, bio et sains, et de favoriser les modes de consommation alternatifs. Par ailleurs, l’accès à la nature est fondamental et doit s’appliquer pour tous·te·s. Les quartiers populaires doivent être végétalisés, avec notamment des jardins d’usage collectif et des fermes locales, destinées à permettre la reconnexion avec la nature, le lien social et l’autoproduction. Un accès à la pleine nature, parcs, forêts et cours d’eau, doit également être facilité. Pour ce faire, l’usage des transports en commun doit être facilité par une tarification sociale universelle et les mobilités actives doivent être accompagnées par des financements adaptés, notamment pour l’achat, l’entretien et l’équipement de vélos en vue d’usages multiples et sécurisés. Les aménagements doivent être repensés afin de protéger les quartiers des pollutions issues des industries, des autoroutes, des ports et des aéroports. Il existe des aménagements anciens adaptés au dérèglement climatique et garantissant des îlots de fraîcheur, tels la Cité-jardin de la Butte rouge à Châtenay-Malabry ou la Cité de la Maladrerie à Aubervilliers. Ces aménagements à haute valeur écologique doivent être mis en valeur comme exemples concrets dont s’inspirer. Enfin, en cohérence avec l’impératif de reconnaissance des pouvoirs d’agir, les économies populaires et de subsistance, qui répondent aux besoins locaux et permettent de lutter contre l’ubérisation de l’économie, ainsi que les initiatives à fort impact écologique, doivent être reconnues et soutenues.
  • L’ouverture d’un accès à une éducation et une santé de qualité, conditions sine qua non d’un développement humain : l’indice de développement humain, créé par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) en 1990, repose sur trois critères : le niveau de vie, l’éducation et la santé. Leur mesure dans les quartiers populaires n’est pas faite, mais si elle l’était, elle révèlerait des niveaux inquiétants. Les stratégies d’évitement scolaire, les « voies de garage » et l’absence de prise en charge préventive de nombreuses pathologies, sont monnaie courante dans les quartiers. Si EELV est en train de dessiner les contours d’une réforme de l’école ambitieuse, le parti doit absolument prendre en compte la situation des quartiers populaires. Le développement humain y passe par un accompagnement à l’émancipation des personnes, tout au long de la vie. Ainsi, au-delà de la nécessaire rénovation du bâti scolaire, de l’augmentation et de la revalorisation des postes d’enseignants et médico-sociaux, de la réforme de l’information et de l’orientation scolaire, qui sont à revendiquer de toute urgence, notre parti doit œuvrer à la reconstitution de services aux familles de qualité (renforcement de la protection maternelle et infantile, développement de modes de garde adaptés aux modes de vie, augmentation des centres médico-psychologiques), et à la restauration du lien entre les familles et l’institution scolaire (remise en place des réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, amélioration du dialogue avec les associations de parents d’élèves). L’éducation populaire, en dehors de l’institution et en complément de celle-ci, doit également être promue, afin de développer la conscientisation, l’émancipation et l’exercice de la citoyenneté. L’accès à l’enseignement supérieur et à la recherche doit être facilité pour les élèves des quartiers populaires, dont les effectifs sont toujours plus à la baisse dans les universités. La formation des adultes constitue enfin un vecteur de mobilité sociale et économique : l’« ascenseur social » doit être réparé. Par ailleurs, les méthodes de la santé communautaire doivent être reconnues, ainsi que l’Organisation mondiale de la santé le préconise depuis la déclaration d’Alma-Ata en 1978. Le principe de « renforcement de l’action communautaire » inscrit dans la Charte d’Ottawa, signée en 1986 à l’issue de la première Conférence internationale sur la promotion de la santé, doit être appliqué dans les quartiers populaires[8]. Là encore, le projet d’EELV en matière de réforme de l’hôpital et des parcours de soins doit intégrer une santé de proximité, adaptée aux spécificités et aux besoins de chacun·e.
  • La réalisation de l’équité territoriale et de la juste allocation des ressources nationales : les territoires de la République ne sont aujourd’hui pas dotés équitablement. Les travaux de Laurent Davezies montrent que les ressources et la richesse nationales circulent de manière déséquilibrée. Les quartiers populaires en pâtissent particulièrement, comme le rapport d’information parlementaire, paru en 2018, sur l’évaluation de l’action de l’État dans l’exercice de ses missions régaliennes en Seine-Saint-Denis, a pu le démontrer très nettement. Le rétablissement d’une allocation des moyens de l’État aux territoires, juste et équitable, est nécessaire. L’équité territoriale, c’est accorder davantage d’attention aux personnes et aux territoires démunis qu’au reste de la population. Pour ce faire, une Cour d’équité territoriale, comme le préconisait en 2018 le plan Borloo, doit être créée afin de garantir la juste allocation des ressources. La Cour des comptes doit également être garante de la disponibilité de données comptables publiques territorialisées. Ces dernières n’existent pas à l’heure actuelle : elles doivent être établies. Enfin, les territoires les plus démunis doivent être mieux identifiés. La géographie de la pauvreté, qui existe via l’outil statistique du carroyage établi par l’INSEE, doit être utilisée afin de cibler l’ensemble des territoires où la pauvreté dépasse le taux national (15%). La mise en place de ces outils doit conduire à la restauration d’un droit commun réparti équitablement, et de fait, à une augmentation considérable des moyens affectés aux quartiers populaires. Une actualisation de la géographie prioritaire est nécessaire, afin de réintégrer les « quartiers de veille active », et d’intégrer les quartiers en situation de fragilisation, où les concentrations de pauvreté sont les plus fortes. La politique de la ville doit ainsi être maintenue, au-delà d’une juste allocation des ressources de l’État et du seul droit commun, et son budget doit être augmenté. 

Unanimité pour

[1]  Définition de la politique de la ville : https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c2097

[2] Les crédits alloués à la politique de la ville sont regroupés dans le budget opérationnel de programme n°147 : https://www.budget.gouv.fr/documentation/documents-budgetaires/exercice-2022/projet-de-loi-de-finances/budget-general/cohesion-des-territoires

[3]  Un atlas de la géographie prioritaire est consultable sur le site internet du système d’information géographique (SIG) du Ministère de la ville : https://sig.ville.gouv.fr/Atlas/atlas-qpv-2017.pdf

[4] La population immigrée constitue plus de 20% de la population des quartiers en politique de la ville, contre un peu moins de 10% en population générale. La situation francilienne en fournit un bon exemple : https://www.institutparisregion.fr/fileadmin/NewEtudes/Etude_1407/NR_759_web.pdf. Selon la définition adoptée par le Haut Conseil à l’Intégration, un immigré est une personne, née étrangère à l’étranger, et résidant en France. Les populations étrangère et immigrée ne se confondent pas : un immigré n’est pas nécessairement étranger et réciproquement, certains étrangers sont nés en France (essentiellement des mineurs). La qualité d’immigré est permanente : un individu continue à appartenir à la population immigrée même s’il devient français par acquisition. C’est le pays de naissance, et non la nationalité à la naissance, qui définit l’origine géographique d’un immigré.

[5] Voir l’étude commanditée par Oxfam et publiée le 5 novembre 2021, « Les inégalités mondiales d’émission de CO2 à l’horizon 2030 : émission de consommation par habitant·e et l’objectif du 1,5°C » : https://www.oxfam.org/fr/communiques-presse/les-emissions-de-co2-des-1-les-plus-riches-parties-pour-etre-30-fois-plus. L’étude indique que les émissions par habitant·e de la moitié la plus pauvre de la population mondiale devraient rester bien en deçà du seuil de 1,5°C fixé pour 2030. Les 1% et les 10% les plus riches devraient émettre des émissions respectivement 30 fois et 9 fois supérieures à ce seuil. Pour atteindre l’objectif de 1,5°C, les 1% les plus riches devraient réduire leurs émissions actuelles de carbone d’environ 97%.

[6] Le terme anglo-américain « woke » désigne le fait d’être conscient des problèmes liés à la justice sociale et à l’égalité des droits. Il trouve ses origines dans le verbe anglais « wake » et dans l’expression afro-américaine vernaculaire « stay woke » (« rester éveillé »). Il est notamment utilisé à partir des années 1960 aux Etats-Unis dans le mouvement des droits civiques. Ainsi, dans un discours à l’université Oberlin (Ohio) en juin 1965, Martin Luther King, qui évitait l’argot dans son expression publique, exhortait les étudiants à rester « éveillés » (« awake ») « pendant la grande révolution » et à « être une génération engagée ». Le terme a refait surface en 2014 à l’époque de la naissance du mouvement « Black lives matter », comme slogan pour encourager la vigilance et l’activisme face à la discrimination raciale. En France, il est utilisé de manière caricaturale et disqualifiante par les détracteur·rices des luttes antiracistes, antisexistes et LGBTQIA+. Il constitue ainsi un marqueur politique fort, qui pourrait être utilement francisé : « je reste éveillé / je suis conscientisé ».

[7] Selon les bilans de l’ANRU et de l’ANAH, 50% des personnes faisant l’objet d’une enquête de relogement indiquent souhaiter rester sur leur commune : https://www.anah.fr/fileadmin/forumhabitat/documents/20180713-Pratiques_de_relogement_dans_les_projets_de_renouvellement_urbain_Avril_2018-Fiche.pdf

[8] La Charte d’Ottawa précise : « La promotion de la santé passe par la participation effective et concrète de la communauté à la fixation des priorités, à la prise des décisions et à l’élaboration et à la mise en œuvre des stratégies de planification en vue d’atteindre une meilleure santé. Au cœur même de ce processus, il y a la dévolution de pouvoir aux communautés considérées comme capables de prendre en main leurs destinées et d’assumer la responsabilité de leurs actions. Le développement communautaire puise dans les ressources humaines et matérielles de la communauté pour stimuler l’auto-assistance et le soutien social et pour instaurer des systèmes souples susceptibles de renforcer la participation et le contrôle du public en matière de santé. Cela exige un accès total et permanent à l’information et aux possibilités d’acquisition de connaissances concernant la santé, ainsi qu’une aide financière. »



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