Exposé des motifs

Une politique en rupture avec les engagements pris

Lors des élections présidentielles puis législatives qui ont suivi, une majorité de citoyen-ne-s ont appelé de leurs vœux une politique de gauche et écologiste. Après les années Sarkozy et leur lot de soutien au « travailler plus pour gagner plus », « l’écologie ça commence à bien faire », les citoyens ont marqué par leur vote, leurs aspirations à changer de modèle de société. À ce titre, la campagne menée par François Hollande puis par les socialistes et les écologistes était porteuse d’espoirs. Régulations de la finance et de la spéculation, égalité, soutien à l’éducation et à la culture, réformes sociétales d’ampleur… tels ont été les piliers d’une campagne qui appelait le changement.

En matière d’écologie le contrat de mandature, connu et rendu public avant les élections laissait entrevoir des orientations ambitieuses en la matière. Force est de constater aujourd’hui que la promesse faite par nous et le PS est loin d’être réalisée. On pourra toujours lister les mesures qui, ici ou là, auront été mises en place, le mariage pour tous en est l’exemple phare, il reste que le modèle de société que nous appelions tous de nos vœux s’éloigne à mesure que passe le mandat. Les gouvernements successifs comme les discours du Président de la République peinent à dessiner le modèle de société vers lequel nous nous dirigeons.

Au lieu d’un chemin tracé (quitte à ce que les efforts pour l’atteindre soient importants), nous sommes face à une série de mesures toutes plus éculées les unes que les autres et qui sont surtout marquées par une vision pour le moins dépassée de notre société : soutien historique pour un gouvernement de gauche aux entreprises, absence de ciblage, pression fiscale uniquement à la charge des ménages, soutien à des projets d’un autre temps comme NDDL, Sivens et tellement d’autres.

Qu’il s’agisse du champ social ou démocratique, les renoncements s’accumulent : remise en cause du droit du travail, priorité donnée systématiquement au MEDEF, abandon du droit de vote des étrangers, redécoupage autoritaire des régions, ne sont que des illustrations parmi une longue liste.

Les dernières déclarations sciemment provocatrices du premier ministre à propos de Notre Dame des Landes illustrent à quel point toute volonté de prendre en considération EELV est absente des préoccupations de ce gouvernement malgré quelques avancées ici ou là et de grands discours sur le climat.

Ces orientations accompagnent une quasi-absence d’avancées réelles au plan environnemental, les décisions les plus importantes étant toujours reportées (fermeture de Fessenheim) ou purement et simplement abandonnées (pollutaxe) quand elles ne sont pas soumises à des arbitrages budgétaires dont on ne sait que trop bien dans quelle direction ils sont effectués. Les récentes déclarations de Ségolène Royal sur la relance du nucléaire semblent même remettre en cause les timides engagements qui avaient été pris en la matière.

Il n’est pas exagéré d’affirmer que les orientations actuelles du gouvernement sont en rupture totale avec l’accord entre le PS et EELV lors des élections nationales de 2012. Dès lors EELV ne saurait être partie prenante de ces orientations ni responsable de la politique menée.

Il serait erroné de considérer que cela est le résultat ou la conséquence d’une participation ou non au gouvernement tant les écologistes ont été confrontés à des choix de société qui contredisent leurs valeurs et ambitions écologistes. Le problème est plus profond : il révèle l’incapacité de l’exécutif à mener une politique ambitieuse et novatrice.,

Face à une telle difficulté à changer le système économique et démocratique ayant pour fondement le capitalisme et l’immuabilité d’une 5è république si décriée par l’ensemble de la gauche autrefois, il est de notre devoir de participer à la Reconstruction d’un espoir pour la France si on ne veut pas que les faux prophètes finissent par convaincre une majorité.

Redonner confiance par une politique de justice sociale, environnementale et démocratique

La Reconstruction doit prendre en considération les différents temps de l’action politique : le court terme dans lequel les citoyen-nes attendent les décisions qui changent la vie quotidienne et le moyen et long terme qui donnent les perspectives et tracent un avenir désirable et attrayant.

Ce long terme est connu, nous l’avons imaginé, partagé et décrit au travers de nos textes et propositions. Il nous faut poursuivre et amplifier l’inlassable travail de diffusion de ce projet auprès des citoyen-nes, des corps intermédiaires et des institutions.

Le moyen terme se construit par étapes, se co-élabore avec les citoyen-nes, et le rôle des écologistes est de proposer des objectifs intermédiaires qui donnent à voir le chemin.

A l’horizon de quelques années, nous devons proposer les changements qui infléchiront suffisamment la société pour qu’un retour en arrière ne soit plus possible.

Cela passe par des avancées importantes en termes économiques, reposant sur une vision indépendante de la croissance au profit des indicateurs de bien être, de la prospérité sans croissance et de l’économie de la fonctionnalité au détriment de l’économie de la propriété. Pour cela des modifications structurelles sont nécessaires. Face aux nombreuses décisions prises au profit des détenteurs du capital (CICE, TSCG, ANI, Pacte de stabilité, etc.) un retour à la régulation et à l’intervention de l’Etat devient une urgence. Les écologistes ne peuvent pas être solidaires des politiques ultralibérales qui creusent les injustices sociales en favorisant les banquiers et patrons du MEDEF au détriment des salariés et des plus modestes. L’attitude plus qu’ambigüe de la France dans la négociation sur la taxe sur les transactions financières est coupable en regard des risques collectifs que fait peser la spéculation sur les sociétés notamment en Europe.

Cela passe aussi par des mesures ambitieuses permettant la mise en œuvre de la transition énergétique au-delà de la loi votée à minima, mais aussi la mise en place d’une fiscalité favorisant les investissements vertueux, l’accélération de la mutation industrielle (notamment dans le secteur des transports), ainsi que la création du cadre législatif permettant la reconnaissance de la santé environnementale.

Les changements de mentalités et du rapport au pouvoir constituent également des objectifs essentiels. La priorité consiste à redonner confiance dans la politique en développant la démocratie participative aux côtés d’une démocratie représentative renouvelée en interrogeant aussi les initiatives nouvelles en France et en Europe

Sixième république, fin du cumul des mandats, proportionnelle pour toutes les élections, transparence et probité comme base de l’action, coopération entre les collectivités plutôt que concurrence, etc. Les droits des salariéEs dans l’entreprise devront également être sensiblement améliorés afin que la citoyenneté existe davantage dans ces lieux. Face au démantèlement de la loi ALUR, du droit du travail, et l’accélération de ce dernier que représente la loi Macron, il est urgent d’inverser la tendance.

Organiser la reconquête

EELV doit sortir du carcan national. Pour les écologistes l’Europe est l’horizon indépassable de la construction démocratique alternative à laquelle nous aspirons.

Pour rendre crédible ce moyen terme il convient, sans attendre, de partir des réalités locales et des mobilisations qui s’y construisent. Les exemples ne manquent pas, qu’il s’agisse de la ferme des 1000 vaches, du barrage de Sivens, de Notre Dame des Landes, d’Europacity, du center parcs de Roybon, etc. A chaque fois les citoyen-nes prennent en charge eux-mêmes la lutte en privilégiant l’intérêt collectif et le long terme sur les intérêts privés de court terme. Notre implication dans ces combats est un ferment de la reconstruction d’un vivre ensemble écologique et social. Elle symbolise la meilleure façon de construire les alternatives. Au-delà, les écologistes ont le devoir de mettre en place une stratégie de renforcement, de diffusion et de contagion des idées écologistes indépendante des alliances.

En particulier, EELV devra pleinement s’investir dans les « Chantiers de l’espoir » qui s’ouvrent avec la société civile, les acteurs de la lutte contre le dérèglement climatique et les formations politiques qui se reconnaissent dans le projet d’émancipation de l’écologie politique.

Ces alternatives peuvent et doivent aussi se concrétiser lors des échéances électorales.

Discrédité par son soutien au gouvernement le parti socialiste entraîne ses partenaires dans sa chute comme l’ont montré les résultats des dernières élections. Seule une nouvelle autonomie reposant sur un programme de reconstruction et une dynamique d’ouverture est à même d’enrayer la spirale ouvrant grande la porte au Front Pour répondre au besoin de clarification national. Mais autonomie ne veut pas dire isolement. Selon les réalités locales cette autonomie peut prendre des formes et des contours variés, les partenaires n’étant pas nécessairement les mêmes partout. Ce qui reste déterminant c’est le contenu programmatique, un projet commun, ouvrant la porte d’un nouvel espoir.

EELV doit prendre toute sa part dans cette reconstruction en initiant les rencontres et débats permettant de créer cette dynamique. C’est cela être réaliste. L’alliance avec le PS au plan local, si elle n’est pas exclue, n’est envisageable que sur la base d’une analyse commune de la situation et d’une condamnation sans ambiguïté des mesures néfastes de la politique économique, sociale et environnementale du gouvernement.

La question de l’appartenance ou de la non-appartenance à la majorité est une question importante qui mérite d’être posée. Elle ne pourra être tranchée qu’au terme d’un débat approfondi impliquant l’ensemble des adhérent-es.

Ce qui doit conduire l’attitude des écologistes, c’est de soutenir tous les projets qui vont dans la direction d’un « Vivre mieux » écologiste et humaniste. Au plan législatif nos parlementaires doivent se sentir légitimes à rejeter les projets contraires sans avoir à se justifier vis-à-vis du PS ou du gouvernement. Les seuls comptes à rendre sont aux citoyen-nes et l’important est notre vision commune de la planète, de ses habitant-es et des moyens à mettre en œuvre.

Pour chaque accord électoral, pour chaque stratégie impliquant l’ensemble de notre mouvement, tout-es les adhérent-es doivent pouvoir s’exprimer et trancher afin de partager les décisions politiques en utilisant tous les outils statutaires en leur possession.

Cela permet de redonner du souffle démocratique à notre parti et d’expliciter plus clairement nos différentes stratégies auprès de l’opinion publique.

La fierté écologiste

L’année 2015 sera marquée par la COP21 en France et constituera un moment privilégié de montée en puissance des thèmes fondamentaux de l’écologie à l’occasion de laquelle l’ensemble des formations politiques va s’évertuer à accaparer la moindre avancée. Dans ce contexte médiatiquement très concurrentiel, 2015 doit être une année d’affirmation, de consolidation, de cohérence et de visibilité d’EELV.

C’est l’honneur des écologistes, de porter l’intérêt collectif au plus haut niveau, de penser autant aux générations futures qu’à celles d’aujourd’hui sans oublier celles et ceux qui ont œuvré avant nous pour les libertés et la justice, de porter ces orientations et de les mettre en œuvre dans les différents exécutifs auxquels nous participons. Fiers de défendre tout-es les déshérité-es de la terre (Roms, Palestinien-nes, immigré-es, étrangers, Français-es), les écologistes condamnent tous les populismes qui stigmatisent et manipulent les catégories les plus fragiles.

Motion

Raison de plus pour être offensifs, déterminés, exigeants, aussi bien avec nos partenaires qu’avec nous-mêmes.

Lancer le chantier de la Reconstruction.

A cette fin il est créé un comité de pilotage.

Composé de 3 membre du BE, 7 membres du CF, 7 représentant-es des régions, il décide des modalités précises de mise en œuvre et notamment l’organisation concrète du débat, les thèmes prioritaires, les enjeux stratégiques, les échéances. Il diffuse les textes supports aux débats, il met en place les outils, etc.

Ces propositions devront permettre une appropriation et une expression de la totalité des adhérent-es et des coopérateurs/trices.

L’ensemble des débats trouve ses conclusions lors du prochain congrès d’EELV qui devra se tenir au cours du deuxième trimestre 2016.

Pour : 67 : Contre : 20 ; blancs : 11

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