Depuis le coup d’État manqué contre le président Erdoğan, l’Europe assiste atterrée au basculement d’un pays jusqu’alors appelé à intégrer l’Union européenne. En Turquie l’État de droit est chaque jour un peu plus affaibli par la purge instaurée par le gouvernement au prétexte de répondre au coup d’État. Europe Écologie – Les Verts dénonce la dérive liberticide du gouvernement turc et en appelle à une action de la France et de l’Europe.

Cette nuit, 11 député-es, élus du Parti démocratique des peuples (HDP), ont été arrêtés par le gouvernement turc. Troisième force politique du pays avec 59 députés (dont 23 femmes), le HDP est le parti turc rassemblant militant-es kurdes et progressistes. Deux autres députés ont échappé à la purge, étant à l’étranger, dont  Tugba Hezer, qu’EELV avait reçue en juillet. Les deux co-présidents du HDP Selahattin Demirtas et Figen Yûksekdag sont parmi les personnes arrêtés et perquisitionnées. Europe Écologie – Les Verts dénonce fermement l’ensemble de ces arrestations.

Ces arrestations ont été rendues possibles par la levée de l’immunité parlementaire des députés du HDP votée en mai par le Parlement, où l’AKP du président Erdoğan dispose de la majorité absolue. Une décision politique qui annonçait la poursuite des purges des opposants et offrait un boulevard à l’élimination de ce parti, la stratégie d’Erdogan visant à décapiter et à faire disparaître le HDP du Parlement.

Pour y parvenir, l’argument du terrorisme est encore une fois utilisé. Leur est reprochée une supposée proximité avec le PKK, organisation qualifiée de terroriste par le gouvernement et en guerre avec lui depuis des années. Après un cessez le feu de deux ans, la guerre a repris en juillet 2015 dans le sud-est, à majorité kurde, engendrant d’innombrables victimes civiles essentiellement kurdes (on comptabilise plus de 40 000 morts dans ce conflit depuis 1984).

L’arrestation des députés du HDP succède à des dizaines de milliers d’arrestations, que le régime a opérées depuis la tentative de coup d’État de juillet dernier (que le HDP avait pourtant condamné) et l’instauration de l’État d’urgence. Les médias ont déjà été muselés : de nombreux journalistes sont poursuivis et 168 médias (journaux, chaines de télévision) ont été fermés. Dans le mois qui a suivi la tentative de coup d’État, les autorités turques ont arrêté 40 000 personnes et 20 000 d’entre elles ont été placées en garde à vue. En outre, 80 000 fonctionnaires ont été licenciés, notamment de nombreux enseignants syndiqués.

Cette affaire est une illustration dramatique de la dérive autocratique du président turc qui installe son pays dans la terreur, les persécutions et la guerre. Le président Erdoğan nargue également l’Europe en annonçant vouloir rétablir la peine de mort, tout en développant une stratégie ambiguë à l’international et particulièrement en Syrie où sa vendetta anti-kurdes joue à la fois le jeu de Daesh et du régime soutenu par la Russie de Poutine.

L’Europe, soucieuse de ne pas se fâcher avec ce partenaire avec lequel elle a signé un accord pour garder en Turquie les centaines de milliers de réfugié-es qu’elle refuse d’accueillir, est particulièrement peu virulente dans ses réactions. EELV demande au gouvernement français, à l’Union européenne et à la communauté internationale d’agir efficacement pour la libération des députés du HDP, et tout au moins rappeler l’ambassadeur français. Plus généralement, EELV rappelle qu’il est urgent de mettre fin à la dérive autoritaire qui prend en otage le peuple turc en prenant des sanctions économiques, politiques et diplomatiques à l’encontre de la Turquie et du régime d’Erdoğan.

« Je m’apprête à solliciter une audience auprès du Ministre des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, pour échanger avec lui de l’ensemble de la situation dans cette zone du monde : Turquie, crimes de guerre en Syrie, accord UE-Turquie et accueil des réfugié-es en France. Ce n’est que par une réponse forte à l’ensemble de ces problématiques, et d’abord et avant tout à la crise syrienne, que nous parviendrons à rétablir la paix et la démocratie en Turquie… et le respect des droits humains chez nous. » indique David Cormand, secrétaire national d’EELV.