5. Coopérer réellement pour le développement : faire de l’Agenda ODD 2030 un véritable projet politique

Engagements internationaux bafoués depuis cinquante ans ; chute libre de l’Aide publique au développement (APD) française et mondiale au niveau le plus bas jamais atteint (0,37 % du PIB français, dont 6 % seulement de dons) ; abandon des pays les plus pauvres, qui reçoivent de la France à peine 150 millions d’euros sur les 8 milliards d’engagements annuels de l’Agence française de développement (AFD) ; abandon ultralibéral de toutes régulations commerciales, agricoles, financières, fiscales et minières : la coopération pour le développement a perdu toute ambition.

Aux 15 Objectifs millénaires du développement 1990-2015 ont succédé les 17 Objectifs de développement durable 2015-2030 (ODD), votés par 193 pays à l’ONU dans l’ignorance générale, malgré une ambition inédite dans l’histoire de l’humanité : en 2030, « Faim zéro, zéro pauvreté, accès pour toutes et tous à l’éducation, à la santé, à l’eau, à l’environnement, à l’énergie… ».

Mais qui connaît l’Agenda 2030, censé unir les pays dits « développés » et ceux dits « en voie de développement » ?

Pour l’Europe et la France, coopérer réellement pour réaliser en 2030 les 17 ODD passe par la mise en cohérence de l’ensemble des politiques publiques nationales et européennes avec ces engagements universels. Cela engage trois dimensions de l’action publique et citoyenne, du local au transnational

 

I. Justice, régulation et partages

Il faut refuser les accords de libre-échange de l’UE, et notamment les Accords de partenariat économiques (APE) imposés à l’Afrique et leur application aux marchés publics.

 

II. Respect des engagements internationaux de la France et de l’Union européenne

Cela suppose l’application réelle des conventions internationales : APD, biodiversité, développement durable, Climat, Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (Pidesc), conventions OIT de l’ONU, ODD, COP 21, etc., ce qui signifie :

  • augmenter l’APD rapidement à hauteur de 0,7 % du PIB (10 milliards d’euros), selon un calendrier contraignant, et la rendre totalement transparente ;
  • exiger une taxe sur les transactions financières (TTF) européenne ambitieuse (180 milliards par an, dont un tiers au moins pour l’APD et un autre tiers pour l’adaptation au climat des PMA) ainsi qu’une TTF française plus large ;
  • prioriser enfin dans l’APD et dans les financements et programmes de l’AFD (aujourd’hui dispersés dans 80 pays) l’aide aux ODD des 47 « pays les moins avancés », la lutte contre la pauvreté et les inégalités, et privilégier les dons aux prêts ;
  • réserver les financements du commerce extérieur, comme les aides militaires (sous conditions éco-sociales), aux ministères ad hoc, à la Caisse des dépôts et consignations et à la Coface.
  • cesser la substitution massive des financements (AFD, CDC, UE, Fonds Vert) et projets climatiques (et post-conflits) aux financements de l’APD, et les flécher prioritairement vers les PMA (aux deux tiers africains) et les États insulaires, en privilégiant leur adaptation climatique et en amorçant l’accès de tou.te.s, aujourd’hui abordable et finançable, à une énergie renouvelable.

 

III. Exigences démocratiques, citoyenneté mondiale et projet de faire société mondialement

Pour ancrer les politiques publiques dans les libertés civiles et politiques, afin de garantir l’intérêt général et l’égalité des minorités, il faut :

  • intégrer systématiquement la dimension de genre et l’égalité femmes-hommes dans la coopération ;
  • systématiser la participation active des populations concernées et la décentralisation à tous les niveaux, et promouvoir, du local au global, une démocratie délibérative autant que représentative ;
  • sortir de la diplomatie commerciale et militaire, et faire vivre une diplomatie des droits humains et de la paix ;
  • en régime autoritaire et dans les pays émergents et néo-émergents, coopérer de société civile à société civile (ONG, collectivités locales) en faveur de l’accès aux droits des plus pauvres et discriminé.e.s ;
  • activer réellement les dispositifs français multipartites de transparence, de débat public et d’action de l’État avec la société civile, via le Conseil national du développement et de la solidarité internationale, l’Observatoire du développement et le contrôle parlementaire (aujourd’hui inexistant) ;
  • soutenir matériellement les ONG Nord-Sud et les collectivités locales dans leur recherche concrète de l’intérêt général, d’accès de tou.te.s aux services collectifs et de lutte contre les inégalités, et dans leur rôle de sensibilisation et de mobilisation des populations aux enjeux 2030 ;
  • stopper l’évolution visible de l’APD vers des accords de « gestion migratoire contre APD et préférences commerciales » ;
  • créer un avenir avec les jeunes par « l’éducation à » et l’action coopérative.